La nouvelle carte d'identité française sera biométrique

La carte d'identité sera donc bien biométrique. L'Assemblée nationale a adopté hier en fin d'après-midi la proposition de loi relative à la protection de l'identité, donnant ainsi naissance à ce nouveau document qui remplacera peu à peu la carte d'identité actuelle. Un décret viendra préciser les conditions de sa mise en place, une fois que la CNIL aura rendu un avis motivé et public. Le gouvernement envisagerait la délivrance des premières cartes dès 2012.

Cette nouvelle carte sera composée de deux puces. L'une, « régalienne », comportera différents éléments, dont certains seront biométriques, qui permettront d'identifier le détenteur. On y trouvera le nom de famille, prénom, sexe, date et lieu de naissance, domicile, taille et couleur des yeux, mais aussi empreintes digitales. Le nouveau document sera gratuit et ne sera pas obligatoire comme la carte d'identité actuelle. En revanche, pour tout renouvellement de la carte d'identité, les particuliers se verront imposer le passage à la carte d'identité électronique.

Le texte prévoit l'intégration facultative d'une deuxième puce, dite de « service », qui ne sera octroyée qu'à la demande de son détenteur. Cette puce permettra à l'intéressé de « s'identifier sur les réseaux de communications électroniques et de mettre en oeuvre sa signature électronique ». La puce, dotée de la technologie sans contact, devra être passée devant un boîtier spécialement fourni et permettra ainsi de s'authentifier en ligne. De quoi, espère le gouvernement, faciliter les démarches d'e-administration, mais aussi les transactions réalisées via les sites de commerce électronique. « Le fait de ne pas disposer de cette fonctionnalité ne constitue pas un motif légitime de refus de vente ou de prestation de services », détaille le texte.

Lutter contre les usurpations d'identité

L'objet de la loi est clair : il s'agit de lutter contre les usurpations d'identité. Le phénomène est en plein développement. L'exposé des motifs de la proposition de loi mentionne le chiffre de 200.000 usurpations d'identité chaque année en France. Et 351.000 cartes d'identité ont été déclarées volées ou perdues en 2009, sur cinq millions éditées. « Nous ne pouvions pas rester inactifs sur ce sujet », note Philippe Goujon, rapporteur du texte à l'Assemblée. La carte rejoint ainsi le passeport biométrique, mis en place depuis 2005.

Reste que le texte risque de faire débat. Il prévoit en effet la constitution d'un « traitement de données à caractère personnel facilitant leur recueil et leur conservation ». Soit un fichier qui intégrera les éléments biométriques et permettra d'identifier le détenteur dans certains cas, s'il y a « un doute sérieux sur son identité ». Par exemple pour des victimes d'accidents, ou dans le cadre d'une enquête policière. Un « lien fort » qui n'était pas prévu par le Sénat. Celui-ci avait prévu qu'on ne puisse directement attribuer une empreinte à une identité. C'est notamment ce point qui a valu le rejet du texte par l'opposition.

Face aux accusations d'atteinte aux libertés individuelles, le gouvernement pointe le fait que les policiers n'auront qu'un accès très cadré au fichier. Les données seront du reste automatiquement détruites après quinze années de conservation. Cette décision ouvre-t-elle un marché aux professionnels de la carte à puce, que sont Gemalto, Oberthur ou Morpho qui délivrent déjà des solutions identiques dans des pays comme la Belgique ou l'Allemagne ? En France, la fabrication des titres d'identité revient à l'Imprimerie nationale, qui a comme partenaire privilégié la société aixoise Smart Packaging Solution (SPS), dont elle est actionnaire. Pas sûr dans ces conditions que la loi profite à tout le monde...

MAXIME AMIOT, Les Echos 2011.07.08 - 07:00